Et si Bernis m'était conté
Brève histoire de la vigne à Bernis
La démolition de la cave coopérative de Bernis, nous donne l'occasion de revenir sur la culture de la vigne dans notre commune.
Une histoire qui commence il y a plus de 2000 ans, avant même l'arrivée des romains, lorsque des colons grecs fondent Massalia, qui deviendra Marseille. Les Grecs y plantent de la vigne, et transmettent leurs savoirs aux Romains, qui les diffusent lors de leur conquête du sud de la Gaule. Le terroir et le climat sont propices au développement du vignoble, et la Gaule Narbonnaise devient une région de production importante dont les vins s'exportent vers Rome.
La « Ferme des Figuiérasses » qui a été fouillée en 2009 à Bernis, témoigne de cette production viticole, du 1er au 3ème siècle environ. Il s'agit d'un ensemble bâti de 1300 m2 environ, soit l'un des plus grands établissements de ce type retrouvé en Languedoc. Des installations de production de vin y ont été identifiées : une cuve, des fonds de dolium.
La culture de la vigne prospère jusqu'au moyen âge, époque où les rois, les seigneurs et les ecclésiastiques apprécient ces bons vins. Les seigneurs et les abbayes se constituent de vastes domaines viticoles. Au moyen âge, la France est le premier producteur et le premier exportateur de au vin du monde !
Après la révolution, les vignobles passent aux mains paysannes. Les pratiques culturales se développent, les rendements s'améliorent ouvrant une course à la production.
Le 1er cadastre de Bernis en 1832 montre l'importance de la vigne : plus de 500 ha sont plantés en vigne, même en garrigue dont une grande partie est cultivée. A partir de 1851, la production annuelle à Bernis dépasse les 9 000 hl de vin, dont la moitié est exportée, et le reste distillé en eau de vie. Mais cet « âge d’or » de la viticulture connaît un brusque coup d'arrêt lors de la crise du phylloxéra. Ce minuscule puceron parasite introduit accidentellement d’Amérique, qui tue les souches en quelques années, arrive dans la plaine du Vistre en 1868. La principale méthode de lutte consiste à inonder les vignes pendant l’hiver. Il en subsiste des traces dans la plaine de Bernis où d’anciens bâtiments en bordures des bras du Vistre abritaient des pompes pour inonder les vignes.
Malgré cela, le vignoble de Bernis est dévasté, 650 ha de vigne sont arrachés, comme partout dans le Gard où il reste moins de 10 000 ha de vigne en 1880. La reconstitution du vignoble en vignes greffées ne s’achèvera qu’après la guerre 14-18. Dans le midi, la vigne déserte les coteaux pour les plaines plus faciles à cultiver. Mais nombre de petits exploitants sont ruinés. Incapables de financer l’achat de nouveaux plans, ils sont contraints de vendre leurs terres. Ceux qui continuent s’endettent pour replanter et se mécaniser, devant produire toujours plus au détriment de la qualité pour survivre.
Poussés par la pénurie, les vignerons mais surtout les négociants, sont tentés par la fabrication de vins frelatés et les importations massives. Les cours s'effondrent créant une nouvelle crise, la « révolte des vignerons » du Languedoc lancée en avril 1907 par Marcelin Albert, le cafetier-vigneron d'Argeliers.
Pour faire face à la crise les vignerons se regroupent en coopératives pour produire et vendre ensemble leurs vins, sans intermédiaires, comme à Maraussan et à Mudaison dans l’Hérault, en 1901. Avant la 1ère guerre mondiale, le Languedoc-Roussillon compte déjà 27 coopératives. L’essor se poursuit entre les guerres, encouragé par l'Etat, et Bernis voit la création de sa coopérative « Les Vignerons de Bernis » en 1939 : un terrain est acheté en bordure de la route qui mène à la gare, et la construction, d'une capacité de 12 000 hl, débute au printemps 1939. Ralenti par la guerre, le chantier se termine à l'été 1941, et la cave reçoit ses 1ères vendanges en septembre.
Les 1ères années sont difficiles, puis les années 50 voient des améliorations quantitatives mais surtout qualitatives. La cave de Bernis bénéficie successivement des délimitations VDQS « Costières du Gard » (1950) puis AOC « Costières de Nîmes » (1986), et de la création du caveau de vente en 1988. Ses vins ont reçu de nombreuses récompenses, notamment au Concours agricole général à Paris.
A la fin des années 90, la production est en déclin, et les vignerons de Bernis fusionnent avec la cave coopérative de Générac dans le groupe « Costières et Soleil » qui produit annuellement plus de 120 000 hectolitres de vin. Le caveau poursuivra son activité de vente jusqu'au 31 décembre 2021, dernier témoin de 80 ans de vie de la Cave coopérative de Bernis.
LES AMIS DE BERNIS
Origine de Bernis
La présence de l'homme sur le sol bernissois est attestée à l'époque néolithique par quelques tessons de céramique et quelques silex taillés au quartier des Rochelles des Faysses et de Cante Graisan.
Mais la réelle dynamique de peuplement se manifeste seulement à partir de 121 avJC lorsque la construction de la Via Domitia reliant Empurias (Espagne) à Rome va traverser de part en part notre commune. Les hommes abandonnent alors les hauteurs (oppidum de Nages... ) pour venir s'établir dans la plaine le long de ce nouvel axe de communication. De petits établissements agricoles vont alors s'implanter de part et d'autre au quartier des Figuerasses , de Canferin, du Plan et du Crozas ...(Une douzaine de sites gallo-romains a été répertoriée 1 ). Leur proximité avec le village actuel laisse supposer que d'autres sites pourraient être enfouis sous les habitations actuelles.
Plus tard, sous l'impulsion de l'abbaye de St Gilles fondée en 694, un antique chemin reliant St Gilles à la Vaunage va connaître un regain d'activité. Empruntant le tracé actuel de la départementale 14 (rue de la Vaunage - Rue de la camargue) notre terroir va se trouver ainsi placé au coeur d'un carrefour d'échanges propice à l'enracinement de la population.
Bernis va alors bientôt rentrer dans l’histoire en 925 au travers d'une charte du cartulaire du chapitre de Notre dame de Nimes sous le terme "Villa Bernices", terme correspondant alors à un regroupement de plusieurs habitats. Nous sommes ici à l'origine du village dont l'archéologue Claude Raynaud situe l'emplacement entre la rue de la Vaunage, la rue St Léonard et le Boulevard Charles Mourier. Par la suite les moines de l'abbaye de St Gilles édifieront en bordure de ce périmètre un petit prieuré qui donnera naissance plus tard à l'église St André.
Le Chateau "Castrum de Bernizes" construit sur un semblant de motte féodale que l'on devine encore de nos jours, supplantera aux environs de l'an mille la "Villa Bernices " et concentrera alors à ses pieds la population qui viendra s’abriter derrière son enceinte médiévale.
Toponymie de Bernis
Au cours des temps plusieurs hypothèses ont été envisagées pour expliquer le nom Bernis donné au village. Celle retenue de nos jours fait référence au terme "Villa Bernices, Berno serait le nom de son propriétaire foncier d'origine germanique ( héritage du royaume Wisigothique) , le radical Ber étant identique à l'allemand Bär prononcé Ber signifiant Ours.
LE LAVOIR
L'histoire des lavandières bernissoises commence sur les bords du Vistre lorsque son cours n'était pas encore encaissé et s'écoulait en surface de la plaine.
Les grandes lessives avaient alors lieu aux abords du pont des "passes-neuves" où dès 1858 pour en faciliter la tâche, la municipalité avait fait construire sur chaque rive deux banquettes en ciment. Sans doute satisfaisaient-elles aux besoins puisque ce n'est qu'en 1876 que l'on décida de construire un lavoir public au "gour de Puech" sur le Vistre. Fut-il construit? Sans doute comme nous l'indique un plan établi la même année, mais malgré nos recherches, nous n’avons pas pu situer précisément ce lieu.
Quelques années plus tard, en 1880, les habitants se plaignant que " les eaux du Vistre étaient sales et sentaient mauvais », la construction d'un nouveau lavoir aux "passes-neuves" est évoquée par la municipalité. Resté sans suite, ce projet, a été repris en partie en 1885 par la municipalité suivante en envisageant cette fois- ci la construction du lavoir au Quartier du "Moulin à vent "qui ne verra également pas le jour.
Ce n'est qu'en 1894, " le Vistre étant devenu totalement impropre et les habitants devant laver leur linge à grande distance du village ou aux pompes communales" que le maire Jacques Challier propose la construction d'un lavoir alimenté par une pompe à vent à l'orée du village ".
En 1895, un terrain au quartier des "portelles "est acheté par la municipalité qui confie l'étude du projet à l'architecte Max Raphel et sa réalisation à M. Charbonnier entrepreneur à Nîmes.
Bientôt les lavandières bernissoises allaient pouvoir laver leur linge dans une eau claire.
L'inauguration du nouveau lavoir aura lieu avec celle de l'horloge le dimanche 19 avril 1896 et occasionnera une grande fête populaire.
Par la suite, il faudra changer le réservoir devenu trop petit (1904) et remplacer la belle éolienne détériorée par de grands vents par un moteur électrique (1920).
En 1949, l'alimentation en eau du lavoir sera raccordée au réseau du Canal du Bas Rhône .
Utilisé par toutes les bernissoises jusque dans les années 1965/1970 le lavoir sera progressivement délaissé et la municipalité en fermera définitivement l'accès le 5 février 1996.
Aujourd'hui, l'association des "Amis de Bernis" rêve de le voir restauré et de voir à nouveau sa belle éolienne tourner. Le projet récemment évoqué par la municipalité de création d'un ensemble immobilier à l'emplacement de la cave coopérative en laisse peut être entrevoir l'opportunité.
Les Amis de Bernis